Reportage diffamatoire d’Yves Engler

"Bien qu'il soit connu pour ses tactiques militantes parfois provocatrices, le réduire à un simple agitateur est une erreur journalistique grave et fallacieuse. Au lieu d'exposer son travail et ses critiques sur la base de recherches sérieuses, l'article recourt à un langage dédaigneux, le décrivant comme quelqu'un qui « hurle à pleins poumons » et le qualifiant d'« agitateur »."


À :

TVA

Francis Pilon

Monsieur Pilon et l’équipe de rédaction de TVA,

Je vous écris au nom de Canadiens pour la justice et la paix au Moyen-Orient (CJPMO) pour exprimer mes inquiétudes concernant votre récent article intituler « Il aurait harcelé deux femmes : Yves Engler, un participant à la propagande russe, arrêté à Montréal. » Cet article est diffamatoire, incohérent et délibérément provocateur, faussant la réalité du profil d'Yves Engler tout en introduisant des accusations non prouvées et sans rapport avec le sujet, afin de salir sa réputation.

Votre article cache délibérément les accomplissements professionnels d'Yves Engler, le présentant uniquement comme un « agitateur » au lieu de reconnaître son statut d'historien, de journaliste et d'auteur respecté. En effet, Engler a publié 13 ouvrages bien documentés et de nombreux articles dans des publications réputées, contribuant ainsi à enrichir le débat public au Canada sur la politique étrangère et les droits humains.

Bien qu'il soit connu pour ses tactiques militantes parfois provocatrices, le réduire à un simple agitateur est une erreur journalistique grave et fallacieuse. Au lieu d'exposer son travail et ses critiques sur la base de recherches sérieuses, l'article recourt à un langage dédaigneux, le décrivant comme quelqu'un qui « hurle à pleins poumons » et le qualifiant d'« agitateur ».

Accusations illégitimes et diffamatoires

Le titre de l’article est profondément sensationnalisé :

« Il aurait harcelé deux femmes : Yves Engler, un participant à la propagande russe, arrêté à Montréal. »

Ce titre associe deux allégations distinctes et non prouvées, les présentant comme des faits établis. L’accusation selon laquelle Engler serait impliquée dans la propagande russe est particulièrement grave et sans fondation.

Votre article s’appuie sur les allégations dans un article publié par Jean-Christophe Boucher, dont la méthodologie est très contestée car elle assimile toute critique de l’OTAN à de la propagande pro-Kremlin.

Son étude manque de transparence, n’est pas évaluée par des pairs et ne fait pas la distinction entre dissidence politique légitime et désinformation orchestrée. L’article utilise une méthodologie basée sur l’IA qui se fonde sur des métriques arbitraires plutôt que sur des preuves tangibles de coordination avec la Russie. Son argument assimile le fait d’être cité par un média russe à être un agent du Kremlin, ce qui est un raisonnement intellectuellement malhonnête.

L’adoption aveugle de cette étude par TVA et Quebecor témoigne soit d’un manque de rigueur journalistique, soit d’une volonté délibérée de tromper votre audience.

De plus, votre article élève la spéculation au rang d’accusation, en affirmant qu’Engler « participe à des publications financées par les services secrets russes »Si vous aviez une preuve concrète, vous l’auriez fournie. Au lieu de cela, l’article avance cette affirmation sans un seul document, transaction financière ou rapport de renseignement vérifié. Il s’agit d’une diffamation manifeste et d’un grave manquement à l’éthique journalistique.

Votre tentative d’associer Engler à la propagande russe via Global Research est également un amalgame fallacieux. Vous admettez que le site republié ses articles sans son autorisation, mais vous utilisez quand même cela pour salir sa réputation. Selon cette logique, tout journaliste dont les articles sont repris par un média controversé devrait être tenu responsable de toute la ligne éditoriale de ce média—une norme absurde et malhonnête.

Par ailleurs, l'article ne parvient pas à justifier cette accusation, au-delà de la référence à un article d'opinion de Terry Glavin publié dans le National Post, un journal qui a l'habitude de publier des affirmations douteuses pour discréditer les détracteurs des politiques canadienne et israélienne.

Pour votre information, M. Glavin a l'habitude de publier des allégations non fondées dans les médias canadiens conservatrice, y compris le National Post, pour dénigrer les détracteurs de la politique israélienne.

Son article d'opinion du National Post liant Engler à la propagande russe n'est pas basé sur des preuves vérifiables mais plutôt sur des allégations vagues et des associations spéculatives. Glavin est connu pour avoir tenté à plusieurs reprises de lier des militants anti-guerres de gauche et des défenseurs des droits des Palestiniens à des réseaux de désinformation russes, malgré l'absence de sources crédibles. Il rejette aussi les violations bien documentées des droits de l'homme par Israël tout en présentant les critiques des politiques israéliennes comme des extrémistes ou des agents de l'étranger.

L'équipe média de CJPMO a largement documenté les activités de désinformation de M. Glavin, comme nous l'avons exposé dans notre communiqué de presse du 22 janvier 2025 (CJPMO's Response to The Free Press). Le fait que votre article utilise les articles d'opinion sans fondement de Glavin comme source principale d'allégations contre Engler est très problématique et ne respecte même pas les normes les plus élémentaires d'intégrité journalistique.

Double-Standard dans l’application de la loi

L’article omet également que Dahlia Kurtz, la plaignante principale, est connue pour ses discours islamophobes et commentaires racistes et anti-palestiniens. CJPMO a documenté comment Kurtz a utilisé ses comptes sociaux:

En juin 2024, j'ai même déposé une plainte officielle contre une émission de radio pour avoir diffusé sa rhétorique incendiaire, qui consistait notamment à qualifier les enfants palestiniens de « terroristes en formation » et à accuser faussement le conseil scolaire du district de Toronto d'antisémitisme pour avoir incorporé une formation antiraciste palestinienne. Elle promu également le déni de la Nakba. Pour rappel, la Nakba a vu plus de 750 000 Palestiniens expulsés de force ou fuyant leurs maisons à la suite de massacres, de violences et d'expulsions militaires par les milices sionistes. Le déni de la Nakba tente de réécrire l'histoire en affirmant que les Palestiniens sont partis de leur propre volonté, qu'ils n'ont pas été expulsés de force ou qu'il n'y a pas eu de déplacements massifs. La plainte a entraîné des excuses publiques de la part de la chaîne, qui a reconnu ne pas avoir contesté la désinformation raciste de Mme Kurtz.

Malgré son historique de discours haineux, la SPVM a choisi de traiter sa plainte tout en ignorant son propre rôle dans la propagation de fausses informations. Votre article ne remet pas en question cette injustice, où un journaliste est criminalisé pour avoir simplement critiqué une figure pro-israélienne bien connue pour ses discours haineux.

Pressions politiques et instrumentalisation du système judiciaire

L’affaire Engler est clairement politisée. Selon Alex Tyrrell, chef du Parti vert du Québec, la police avait initialement classé l’affaire sans suite, avant que Neil Oberman, candidat conservateur, n’intervienne pour faire pression sur les autorités afin qu’elles déposent des accusations.

Oberman, qui a déjà échoué dans sa tentative judiciaire pour démanteler l’encampement pro-palestinien de McGill, tente maintenant d’utiliser le système judiciaire comme une arme contre les militants. L’emprisonnement d’Engler pendant cinq jours avec menottes et entraves aux pieds pour une série de tweets relève de la persécution politique, et non de la justice.

Pour conclure, TVA a la responsabilité de rapporter les faits de manière juste et équilibrée, surtout lorsqu’il s’agit d’une affaire ayant des implications graves pour la liberté de la presse et la répression politique.

Cet article échoue sur plusieurs points :

  1. Effacer les qualifications d’Engler en tant qu’auteur et historien, en le réduisant à un simple « agitateur ».
  2. Relayer sans esprit critique des accusations infondées de propagande russe, basées sur une étude biaisée et non vérifiée.
  3. Ignorer l’historique de désinformation et de racisme de Dahlia Kurtz, tout en présentant la critique de ses discours haineux comme du harcèlement.
  4. Passer sous silence l’ingérence politique derrière son arrestation, notamment les pressions exercées par Neil Oberman.

CJPMO demande à TVA d'émettre une correction ou un suivi qui reconnaisse ces problèmes et qui fournisse un rapport objectif de la situation. Si TVA ne répond pas, je n'aurai d'autre choix que de déposer une plainte formelle auprès du Conseil de presse du Québec.

Dans l’attente de votre réponse,

Anthony Issa
Analyste des médias
Canadiens pour la justice et la paix au Moyen-Orient