La décharge d'Israël de sa responsabilité d'assurer l'approvisionnement alimentaire et médical à la population de Gaza

"Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) indique clairement qu'Israël occupe toujours la bande de Gaza et en conséquence, pour citer l'article 55 de la quatrième convention de Genève : la puissance occupante a le devoir d'assurer l'approvisionnement alimentaire et médical de la population ; elle devra notamment faire venir les denrées alimentaires, les réserves médicales et les autres articles nécessaires si les ressources du territoire occupé sont insuffisantes."


Le 19 octobre, 2023

À: 

Marie-Andrée Chouinard, rédactrice en chef, Le Devoir 

Adel Zaanoun, Journaliste, AFP 

Tim Wichter, Journaliste, AFP 

Sylvain Estibal, Directeur régional Moyen-Orient et Afrique du Nord, AFP 

Chers Marie-Andrée Chouinard, Adel Zaanoun, Tim Wichter, et Sylvain Estibal, 

Je vous écris pour souligner mon inquiétude par rapport à l’article « Désespérés, les Palestiniens de Gaza attendent l’aide humanitaire promise », publié le 19 octobre, dans Le Devoir. 

Cet article rapporte, principalement, sur l’aide humanitaire bloquée ne se rendant pas à Gaza. Cependant, il y a deux enjeux dans cet article qui méritent d’être soulignés et changés. 

Le premier est que vous écrivez que le ministère de la Santé est contrôlé par le Hamas. Non seulement, c’est inexact, c’est aussi un biais étant donné que vous ne faites pas de même avec Israël. Vous n’écrivez pas qu’un parti politique israélien contrôle des ministères. Un tel langage est provocateur et constitue tout simplement une mauvaise couverture médiatique qui décrédibilise les informations du côté palestinien. 

Je vous suggère donc de retirer « contrôlé par le Hamas » de la phrase suivante : « Près de 3500 personnes ont été tuée à Gaza, selon le ministère palestinien de la Santé contrôlé par le Hamas ». 

Le deuxième est que malgré que vous souligniez que Gaza subit un blocus terrestre, aérien et maritime depuis 2007, vous ne le prenez tout simplement pas en considération pour expliquer à vos lecteurs pourquoi l’aide humanitaire ne se rend pas à Gaza. 

Vous écrivez que le point de passage de Rafah, d’où les convois d’aide humanitaire doivent se rendre, est « le seul qui ne soit pas contrôlé pas Israël », vous citez le Président américain disant que l’entrée d’un second convoi dépend de « si le Hamas (s’en) saisit ou ne les laisse pas passer » et vous écrivez que le « territoire palestinien [est] contrôlé par le Hamas ». De tels mots ne font que rejeter le blâme de la situation sur les Palestiniens alors qu’Israël est le seul responsable de la situation étant donné son statut de pouvoir occupant qui a des obligations internationales à respecter (avant même le 7 octobre). Pour assurer une bonne couverture de ces événements, vous devez le mentionner. 

Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) indique clairement qu'Israël occupe toujours la bande de Gaza et en conséquence, pour citer l'article 55 de la quatrième convention de Genève : 

la puissance occupante a le devoir d'assurer l'approvisionnement alimentaire et médical de la population ; elle devra notamment faire venir les denrées alimentaires, les réserves médicales et les autres articles nécessaires si les ressources du territoire occupé sont insuffisantes (Traduction libre) 

Certains médias canadiens locaux, tels que CTV et le Globe and Mail, mentionnent qu’Israël occupe la bande de Gaza et vous devriez faire de même pour respecter vos obligations journalistiques et bien couvrir les événements. 

Je vous suggère d’ajouter le paragraphe suivant : 

Israël maintient un contrôle étroit sur l'espace aérien et les frontières de Gaza, et les Nations unies, le Comité international de la Croix-Rouge et les observateurs juridiques internationaux s'accordent à dire qu'il est par conséquent la puissance occupante à Gaza, malgré le retrait de ses colonies de Gaza en 2005. Les puissances occupantes sont tenues, en vertu de la quatrième convention de Genève, de subvenir aux besoins en nourriture, en eau et en soins médicaux de la population qu'elles occupent. Bien avant qu'une bombe ne détruise l'hôpital Al-Ahli de Gaza, Israël était déjà en violation du droit humanitaire international. 

J’espère que Le Devoir et AFP apporteront ces changements et amélioreront la couverture de futurs événements. 

Si vous le souhaitez, vous pouvez me contacter au 438-380-5410 pour plus d'informations. 

Cordialement, 

Fatima Haidar, 

Analyste de médias, Canadiens pour la justice et la paix au Moyen-Orient